Bienvenue, bienvenue, bienvenue...

Gudule, c'est ma plante de bureau. C'est aussi la compagne de Norbert, ma seconde plante de bureau.


Gudule, seconde du nom, est une kalanchoé née en 2014 tandis que Norbert est un Dracaena Marginata, né à une date inconnue. Ensemble, ils attendent un bébé-plante de bureau (comprendre qu'ils l'auront quand la propriétaire schizo aura trouvé la perle rare).


Gudule en voit des vertes et des pas mûres. Elle râle, partage ses bons plans & astuces, écrit beaucoup, voyage un peu... Elle bricole aussi. Elle n'est ni vraiment écolo, ni vraiment bobo, ni vraiment fashion, ni vraiment féministe... Elle tente juste d'avoir la tête sur les épaules... Un peu.


Bref, bienvenue dans le bazar de Gudule! (parce qu'on s'en moque de Norbert, il parle pas).

lundi 12 janvier 2015

Gudule, l'anticléricalisme et le droit au blasphème...

"Les religions sont comme les vers luisants: pour briller, il leur faut de l'obscurité."

d'Arthur Schopenhauer


La religion... Un vaste sujet compliqué au vu de la susceptibilité des Croyants. Pourtant, avec les événements de ces jours derniers, je pense qu'il est bon de remettre un peu les choses dans leur contexte pour que le peu de gens qui me lisent se souviennent de deux ou trois détails de l'Histoire (qui, pour leur décharge, sont joyeusement oblitérés des manuels de cours parce que l'on préfère le politiquement correct que simplement expliquer correctement l'histoire d'un pays à sa population... ce n'est pas le débat ici...).

En France, nous avons une longue histoire avec la caricature des religions, l'anticléricalisme et le blasphème (même si c'est plus récent pour ce dernier).
Je parlerai essentiellement de la France puisque c'est surtout son histoire que j'ai étudié à haut niveau.


Donc, commençons par une explication de ce qu'est l'anticléricalisme. Le pays ayant une grosse affinité avec la religion Catholique, il est on ne peut plus évident que l'anticléricalisme a d'abord uniquement concerné l'Eglise Romaine. On entend par anticléricalisme ce qui s'oppose (logiquement) au cléricalisme. C'est-à-dire, le moment où le fait religieux dépasse la frontière des affaires temporelles.
Outre le fait d'être profondément anti-religion, l'anticléricalisme est donc pour l'établissement d'une frontière ferme entre les affaires spirituelles et les affaires temporelles.
Il est on ne peut plus clair que cette notion est l'une des bases de la loi de 1905 séparant l'Eglise et l'Etat puisqu'elle insiste pour, justement, cette séparation. Plus largement, toutes les religions sont concernées par ce fait. Chose que l'on oublie trop souvent.

L'Action Cléricale sur notre malheureuse planète - 1908 - La Calotte. Par Asmodée

En lui-même, l'anticléricalisme est un terme assez récent. Jusqu'au XIXème siècle, l'on devrait parler de "catholicophobie" (terme barbare s'il en est).

En France, cette "catholicophobie" prend racine bien avant la Révolution de 1789. En effet, elle semble, à l'évidence, remonter avec les débuts du protestantisme durant lesquels l'Eglise Catholique a été vivement critiquée. Mais c'est avec les Lumières qu'elle prend réellement son essor.

La philosophie des Lumières (en résumé) est d'abord une insurrection contre l'autorité de ce qui a gouverné le pays pendant des siècles: Dieu, la Religion, les Despotes... Si certains philosophes sont déistes (à l'instar de Voltaire), d'autres sont franchement athés (comme Diderot). Toujours est-il que tous se mettent d'accord pour critiquer l'Eglise et ses représentants.
On retrouve notamment des germes de l'anticléricalisme de la Révolution dans, notamment, les articles du Baron Paul Henri d'Holbach (ou du moins, qui lui sont attribués... 376 selon la dernière estimation), ami de Rousseau, Adam Smith...


La Révolution Française marque le point d'orgue de la "catholicophobie" ambiante au XVIIIème siècle. Pour rappel, le 4 Août 1789 c'est l'abolition des privilèges avec, dans la foulée le 26 août, la signature de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (qui marque les bases, tout de même, de notre société actuelle...).
La DDHC a cela d'unique que c'est l'un des seuls textes de l'époque qui aboli la notion de religion d'Etat. L'Eglise n'a qu'à aller se rhabiller: toutes les religions sont permises (officiellement).
Dans un domaine moins joyeux, au cours de la Révolution, Stanislas-Marie Maillard orchestre le massacre de près de 200 religieux (Massacres de Septembre à la prison de l'Abbaye et à la prison des Carmes).

Camus, Talleyrand, Rabaut-Saint-Etienne, la Religion. - 1791
La religion est vendue comme un esclave par Talleyrand (ancien archevêque d'Autun) et par le pasteur Rabaud Saint Etienne à Camus.
Caricature contre révolutionnaire.


Il est on ne peut plus clair que la christianophobie de la Révolution Française est héritée du comportement plus que léger du clergé durant des siècles.

L'anticléricalisme s'annonce à travers les décisions prises post-Révolution: constitution du clergé civil (1790), les prêtres réfractaires à la Révolution sont considérés comme ennemis publics en 1792, glissement de l'Etat Civil des églises aux mairies (1792)...
D'une manière générale, la Terreur a instauré une floppée de mesures anti-religieuses:
  • suppression des congrégations
  • déchristianisation encouragée par des représentants (et qui se développe dans la capitale durant la Commune)
  • églises désaffectées ou transformées en Temple de la Raison
  • confusion entre les prêtres réfractaires et les prêtres constitutionnels 
  • interdiction du culte catholique
  • ...


Quelques années après, il aurait été logique de croire qu'une fois le climat apaisé, la religion aurait prit une place plus... "neutre" si l'on peut dire. Et bien non.

En 1801, est signé le Concordat qui, jusqu'en 1905, organise les rapports entre l'Etat et les religions.Nous devons ce dispositif à Napoléon (durant le Consulat) qui a eut du mal à le mettre en place. Il est le résultat de négociations entre Napoléon et le pape Pie VII. Globalement, cela apaise les tensions entre la République et l'Eglise. Néanmoins, les mesures ne sont pas souvent favorables au clergé:
  • clergé est encore fonctionnaire
  • le conseil d'Etat peut intervenir dans les affaires civiles de l'Eglise
  • le catholicisme n'est plus une religion d'Etat
  • rien n'est prévu pour les congrégations religieuses

Les choses se gâchent rapidement. Sous la monarchie de Juillet, après les abus de la Restauration, l'anticléricalisme reprend du poil de la bête. Durant la révolution de 1830, l’archevêché de Paris est mis à sac, les croix et les congrégations sont malmenées en province... Des pamphlets circulent, des pièces de théâtre sont violemment anticléricales...

DELACROIX - 1822 - caricature d'un ecclésiastique tenant une croix

Après les émeutes de Février 1831, après que de nombreux lieux appartenant à l'Eglise aient été dévastés, l'Etat sévit encore contre les prêtres qui sont jugés responsables d'exciter les passions populaires.

Suite à la présidence de MacMahon  (le parti du « sabre et du goupillon »), Gambetta, en 1877, lance son fameux: « Le cléricalisme, voilà l'ennemi ! » dans un discours à la Chambre. C'est ainsi qu'est signé l’hallali. De fait, les manifestations de l'anticléricalisme étatique se multiplient: 
  • Loi dite d'abonnement de 1895 (complétée par la loi de 1901 sur les Associations) visant à ruiner les congrégations religieuses
  • Séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905 qui provoqua la Querelle des Inventaires ainsi que la fin du Concordat
  • Expulsions de religieux
  • Interdiction d'enseigner
  • Affaires des fiches
  • ...
Caricature d'Edmond Lavrate (1829-1888)



Les journaux eux-mêmes s'en donnent à coeur joie. Parmi ceux que l'on peut citer, il y a La Calotte ainsi que Les Corbeaux. Tous deux sont les symboles du fait que la caricature et le rire sont utilisés comme arme de propagande pour réduire l'influence de l'Eglise Catholique sur les esprits. Les affiches, les "flyers", les annonces, les journaux... C'est tout un arsenal voué à décrédibiliser la religion qui est mit en branle.




C'est donc dans cette ambiance que s'annonce la Première Guerre Mondiale. Au lendemain du début de cette guerre, l'Etat Major, par télégramme, fait part de sa décision d'accepter de nouveau les congrégations au sein de l'armée. De fait, les mises à l'écart de la religion catholique sont abrogées.

Il était néanmoins trop tard. En effet, la déchristianisation (et donc le rejet latent de n'importe quelle religion) était un processus bien trop engagée pour que l'on puisse revenir en arrière.




Bien sûr, je n'ai pas évoqué toute l'histoire du lien compliqué entre la religion et l'Etat depuis la Révolution Française. Ce serait trop long. Je n'ai brossé que les grandes lignes afin de remettre en lumière les racines profondes de la tendance française à se jouer des religions, quelles qu'elles soient.
Bien évidemment, c'est un sujet plus compliqué que cela.

Concernant le blasphème, cette notion a été rayée du droit français avec la DDHC (article 10 et 11), puis réhabilitée sous la Restauration avant d'être définitivement abrogée en 1881 par la Loi du 29 Juillet sur la Liberté de la Presse avec néanmoins quelques limites: la « provocation aux crimes et délits » reste sanctionnée (art. 23), de même que l'apologie de crimes contre l'Humanité ou l'incitation à la haine ou à la violence en raison de la religion (art. 24), ou la diffamation contre un groupe religieux (art. 32).
A noter que le blasphème est encore passible de prison en Alsace-Moselle.

Je vous enjoins à lire l'article du site Contrepoints à propos du droit au blasphème. Le blasphème y est érigé comme l'un des symboles ultimes de la laïcité. Je rejoins l'auteur de l'article au sujet du fait que la notion de blasphème ne devrait en aucun cas venir sur le plan juridique. Ce n'est qu'une notion religieuse qui n'a rien à faire dans un pays laïc.



Ils en parlent:


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