« La dictature, c’est "ferme ta gueule" ; la démocratie, c’est "cause toujours". »
de Jean-Louis Barrault
En ces temps
d’empoignades et d’opérations séduction pour gratter des voix un peu dans les 4
coins de notre cher pays, il semble que beaucoup de personnes oublient
l’histoire de la démocratie et ce qu’est la démocratie. Il faut dire qu’avec
les « impératifs » financiers et euh… financiers… elle est pas
franchement jojo la démo en ce moment.
Petit retour
en arrière. Histoire de pas oublier et pourquoi pas de remettre quelques
neurones en place..
Comme j’en
ai l’habitude, je vais diviser le sujet en plusieurs parties. Le premier
article traitera donc des bases ainsi que des différents types de démocratie.
Le second sera l’histoire même de la démocratie. Un troisième sera axé
philosophie. Et le dernier…on verra si je le fais.
« La démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple »… Dixit Abraham Lincoln |
Les bases
Lorsque l’on
est écoliers en France, on apprend que la démocratie vient du grec δημοκρατία / dēmokratía, combinaison de de δῆμος / dêmos,
« peuple » et κράτος / krátos,
« pouvoir ». L’interprétation actuelle est « souveraineté du peuple ».
C’est un régime politique dans lequel le
peuple a le pouvoir. A noter qu’il y a une distinction à faire entre le
peuple et les citoyens car la citoyenneté, en Grèce Antique, n’est pas
forcément accordé à l’ensemble de la population.
La citation d’Abraham
Lincoln que j’ai donnée un peu plus haut est reprise mot à mot dans l’article 2
de notre propre constitution. Elle est
établie comme étant le principe-même de notre système gouvernemental. C’est
une définition proche du sens étymologique du terme démocratie. Ce dernier,
cependant, possède une définition souvent sujette aux interprétations
différentes aussi bien quant à ce qu’elle sous-entend vraiment que quant à sa
mise en pratique. De ce fait, à l’heure
actuelle, il n’existe toujours pas de définition communément admise par tout un
chacun sur cette pauvre planète.
Malheureusement,
la définition de la démocratie se complique encore plus quand on sait qu’un
gouvernement est dit démocratique par opposition aux systèmes monarchiques et
oligarchiques (merci Aristote et Polybe !). Différenciation mise à mal par
l’existence de la monarchie parlementaire. D’autres personnes, comme Karl
Popper, mettent la démocratie directement en opposition avec la tyrannie et la
dictature, considérant que la première permet de contrôler les dirigeants sans
recourir à une révolution.
A noter que
le terme de démocratie ne se réfère pas uniquement à des gouvernements mais
peut aussi se référer à une forme de société ayant pour valeur la liberté et
l’égalité ou, plus généralement, à un ensemble de valeurs, d’idéaux et de
principes politiques, sociaux et culturels. De même, l’adjectif démocratique
s’applique aussi parfois à des organisations qui n’ont rien de politique.
Même si je
reviendrai sur la philosophie de l’idée de la démocratie, je fais un arrêt sur
image sur Karl Popper, histoire de vous préparer mentalement à l’article axé
philosophie.
Un peu de philosophie politique avec Karl Popper
Pour la
culture gé, Karl Popper est un philosophe politique (entre autres, hein… il
était du genre multitâche le petit) né en 1902 et mort en 1994. Bien qu’il
réfute cette appellation, Popper a
énormément réfléchi au sujet de la démocratie via sa critique de l’historicisme
tout en défendant l’indéterminisme (pour ceux que j’ai perdu, suivez les
liens, j’vous dépose sur Wikipédia). Ses idées
politiques sont libérales et pour lui, la liberté de l’homme est fondamentale
et doit être protégée. Enfin, même s’il est fondamentalement libéral, Popper n’exclut pas l’interventionnisme de
l’Etat même dans le domaine économique. A ses yeux, c’est même une
condition sine qua non au libre exercice de la liberté des individus et ce, en
raison du « paradoxe de la liberté » : « La liberté, si
elle est illimité, conduit à son contraire ; car si elle n’est pas
protégée et restreinte par la loi, la liberté conduit nécessairement à la
tyrannie du plus fort sur le plus faible » (dans La Société ouverte et ses ennemis).
Il ne distingue
que deux régimes politiques : la démocratie et la tyrannie. Deux termes
qui ne sont que des repères terminologiques pour Popper. A la question recuite
« Qui doit gouverner », il propose une interrogation de
remplacement : « Existe-t-il
des formes de gouvernement qu’il nous faille rejeter pour des raisons
morales ? Et inversement : existe-t-il des formes de gouvernement qui
nous permettent de nous débarrasser d’un gouvernement sans
violence ? » (dans Etat
paternaliste ou Etat minimal). Il faut donc comprendre que, pour Popper,
sera démocratique tout régime répondant à ces critères.
En
réfléchissant sur l’organisation de la démocratie, Popper rejette en bloc la démocratie directe puis le scrutin
proportionnel. Dans le premier cas, le peuple est responsable devant
lui-même, ce qui constitue une contradiction puisqu’il ne peut se destituer
lui-même. Dans le second cas, puisque tous les partis sont représentés, les
coalitions sont donc nécessaires pour pouvoir gouverner ce qui sous-entend que
certains partis pourraient rester au pouvoir sans jamais être destitués. La préférence de Popper va donc à la
démocratie représentative avec scrutin majoritaire ainsi qu’au bipartisme avec
un système de primaires internes.
Aller, j’ai
pitié de vous : passons à la typologie des démocraties. Sortez l’aspirine,
c’est lourd !
Typologie des démocraties ou comment perdre la boule…
Commençons
avec la démocratie directe. Le
pouvoir est exercé directement par les citoyens, sans avoir besoin
d’intermédiaires constitués par les organes représentatifs. On retrouve ce type
de démocratie notamment au niveau local. Par exemple en
Nouvelle-Angleterre au travers des town meeting durant lesquels la population
des communes décide des impôts, des lois et du budget. Plus près de nous, en Suisse,
avec les Ladsgemeinde ou avec l’introduction du droit de veto populaire au
XIXème siècle. L’idée de la démocratie directe est associée à celle de
l’autogestion, d’autant plus quand elle se rapporte au domaine économique. On
considère que les conseils ouvriers (en Allemande ou en Italie) sont des
expériences de démocratie directe.
Passons à la
démocratie indirecte ou représentative.
Le pouvoir est exercé par des représentants élus par les citoyens. Les premiers
sont alors chargés d’établir les lois et/ou de les exécuter. Par abus de
langage, elle est devenue ce qui est entendu quand on parle de démocratie. Dans
tous les cas, les dépositaires du pouvoir ne sont pas obligatoirement élus par
les citoyens. Ils peuvent être nommés par le chef de l’Etat. Cette fameuse
démocratie indirecte a plusieurs variantes distinctes.
Le régime parlementaire. Le gouvernement
est politiquement responsable devant le parlement duquel il est souvent issu et
qui peut dont le destituer en recourant à une motion de censure aux modalités
variables en fonction des pays. En contrepartie, le gouvernement peut dissoudre
l’assemblée. Il y a séparation des pouvoirs dans le sens où le gouvernement est
l’exécutif, l’assemblée le législatif. On distingue aussi le régime
parlementaire moniste (le gouvernement n’est responsable que devant le
parlement et non le chef de l’Etat qui joue un rôle politique minime) et le
régime parlementaire dualiste (le gouvernement est responsable devant le
parlement et le chef de l’Etat).
Le régime présidentiel. Il se caractérise
par une séparation des pouvoirs bien plus stricte. Le pouvoir exécutif n’a
aucune responsabilité devant le pouvoir législatif qui ne peut destituer le
premier. Le Chef de l’Etat (qui est aussi le chef du gouvernement) est élu au
suffrage universel direct et dispose de moins de pouvoir que dans le régime
parlementaire sur l’Assemblée. Le principal pays dont le régime est
présidentiel est : les Etats Unis. Dans ce dernier, le président dispose
d’un droit de veto sur les textes de loi.
Le régime semi-présidentiel ou mixte. Il
se retrouve entre les deux. C’est le cas de notre chère Vème République
Française dans laquelle le Chef de l’Etat est élu au suffrage universel direct,
nomme les membres du gouvernement et les destitue quand ça lui chante. Il peut
dissoudre l’Assemblée mais cette dernière, comme le Sénat, ne peut remettre en
cause que le gouvernement via la motion de censure (principalement). Si le
président ne dispose pas de la majorité parlementaire, on parle alors de cohabitation
puisque son chef de gouvernement ne fait pas partie de sa mouvance politique.
Le régime d’Assemblée. Un peu désuet dans
le sens où il n’est plus vraiment mis en pratique, c’est un régime
représentatif dans lequel une assemblée unique, élue au suffrage universel
direct, détient l’ensemble des pouvoirs politiques, l’exécutif et le judiciaire
étant subordonnés au pouvoir législatif.
La démocratie libérale. C’est une
démocratie représentative dans laquelle la capacité des élus à exercer un
pouvoir de décision est soumise à la règle de droit et est généralement
encadrée par une constitution qui met l’accent sur la protection des droits et
des libertés des individus… ce qui pose un cadre contraignant aux dirigeants.
Il n’y a pas de forme de régime représentatif particulier dans la démocratie
libérale. En revanche, un certain nombre de valeurs y sont rattachées. Ces
dernières se rapportent tant aux principes de la représentation démocratique
qu’aux principes du libéralisme… Petite liste non exhaustive : existence
d’un état de Droit, élection des représentants au suffrage universel direct (un
citoyen = une voix), respect de la volonté générale et recherche de l’intérêt
général (souvent défini par les dirigeants eux-mêmes…), égalité des droits,
garantie des libertés fondamentales…
Petit cas à
part, la démocratie par tirage au sort.
Elle avait cours durant la démocratie athénienne pour les élections des
magistrats. Par exemple, pour désigner les membres de la Boulè ou pour le
tribunal populaire. Le tirage au sort est utilisé en vue de garantir l’égalité
politique, améliorer la représentativité et éviter la corruption. Il est aussi
associé à des mandats relativement cours dans la démocratie athénienne (un an
environ). En France, on utilise le tirage au sort pour la formation de jury
d’assise.
Les systèmes mixtes. Comme leur nom
l’indique…
La démocratie semi-directe qui emprunte
aux deux formes de démocraties déjà expliquées. Les citoyens élisent des
représentants chargés d’établir les lois mais les premiers sont aussi amené à
faire des lois par référendum (ou les refuser). L’exemple le plus typique est
la Suisse où les droit d’initiative et de référendum sont la norme : les
citoyens sont appelés à voter 4 fois par an afin d’accepter ou refuser les
lois.
La démocratie participative. Les citoyens
sont associés aux décisions prises par les représentants dès l’élaboration et
jusqu’à leur application.
Donc nous voilà arrivés à la fin du premier article. Il était suffisamment massif pour que je le coupe ici. Pour une fois, je ne vais pas vous donner de bibliographie. Tout ce dont je me suis servie est aisément trouvable sur la toile...
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